Clio et Calliope
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Etre croisé pour la Foi

L'appel de la Foi

Suite aux nouvelles menaces des pèlerins en Terre Sainte, nées de l'invasion turque, l'appel de la Papauté à la croisade a reçu une réponse très favorable. Une réponse positive d'abord de la part du peuple qui, poussé par la promesse de Rédemption et guidé par la Foi et quelques prédicateurs comme Pierre l'Ermite, s'est mis en route avant la date de départ fixée au 15 août 1096. Les pèlerins sont mal équipés, sans argent ni nourriture. Cet élan spirituel, premier sursaut des croisades, se transforma vite en exactions contre les Juifs allemands puis en un massacre des populations restant sans protection par les Turcs, courant octobre 1096. Les croisades débutent dans le sang.

A côté de cet élan populaire que l'histoire a nommé la croisade des pauvres existe celle des seigneurs européens provenant de France, d'Italie ou d'Allemagne qui s'unissent autour d'une même valeur unificatrice qu'est l'Eglise et d'un but ultime, la défense des lieux saints. La piété religieuse est réelle et guidée par un sentiment de bienfaisance. Quatre armées croisées se mettent en marche en 1097. Chacune est dirigée par un seigneur de renom, Godefroi de Bouillon (en route avec son armée ici à gauche), Bohémond Ier, le comte de Toulouse Raymond de Saint-Gilles et une présence religieuse incarnée par le légat du Pape Adhémar de Monteil. Chaque armée doit gérer elle-même ses dépenses et a libre choix de l'itinéraire pour rejoindre le point de rendez-vous : Constantinople.

Arrivés dans la ville héritière de l'Empire Romain, les croisés signent un accord avec l'Empereur, moyennant une aide militaire contre la cession des terres reprises. Les croisés se lancent alors à l'assaut des principales villes turques. Avec plus ou moins de facilité, ils prennent Nicée, Antioche et arrivent en 1099 aux portes de Jésusalem. La cité, défendue par les Egyptiens, ne résiste pas à l'assaut d'une armée techniquement supérieure par l'apport de machines de siège, construites sur place ou déplacées en kit. Après deux ans de conquête, l'objectif est atteint: les croisés ont libéré la Ville Sainte en faisant verser le sang des infidèles. La majorité des participants regagne l'Europe, seul Godefroi de Bouillon et ses troupes restent sur place pour instaurer une puissance occidentale durable : les états latins d'Orient répartis en quatre: principauté d'Antioche, comté d'Edesse, comté de Tripoli (Syrie), royaume de Jérusalem (voir carte ci-contre).
Les victoires et l'occupation qui ont suivi résultent en grande partie de la désorganisation arabe, de leur infériorité technique mais surtout de leur manque d'unité. Or, à partir du début du XIIe siècle, sous l'autorité d'Imad al-Din Zanki, souverain de Mossul, le peuple musulman gagne en unité ce qui lui permet de poursuivre la lutte contre les Chrétiens d'Orient. Leur mobilisation leur permet d'obtenir de premières grandes victoires et de fragiliser ainsi l'implantation née de la première croisade. C'est ainsi que le comté d'Edesse, l'un des quatre Etats Latins le plus ancré dans les terres, est repris en 1144 par les armées arabes.

Conscient de la faiblesse des forces restées sur place et désireux de conserver les lieux saints du Christianisme, le Pape Eugène III répond à cette contre-attaque arabe par la proclamation de la seconde croisade. Tout comme la première, elle rencontre un franc succès et de grands personnages comme le roi de France Louis VII ou l'empereur du saint Empire romain Germanique, Conrad III, s'engagent dans le combat pour la préservation des Saints Lieux. En 1147, soit trois ans après l'offensive arabe, une armée européenne est en route vers Jérusalem.

Mais ce second élan religieux ne rencontre pas le même succès militaire : l'armée de Conrad III tombe dans une embuscade turque tandis que celle de Louis VII, partie un mois après, échoue devant le siège de Damas. Après s'être emparé de Chypre et de Saint Jean d'Acre, chacun regagne l'Europe sans tenter un nouvel assaut.

Cet échec des armées croisées permet aux Musulmans de se regrouper et de s'organiser davantage pour frapper avec force, sous le commandement de Saladin en 1169. Cette victoire offre non seulement à Saladin une renommée formidable, lui permettant de gouverner un territoire qui s'étend, sur sa superficie maximale, du désert de Lybie et la vallée du Tigre en Irak, mais aussi d'encercler les reste des Etats latins. Saladin poursuit la reconquête des territoires latins et prend la ville de Jérusalem en mai 1187: la ville objectif des croisades est désormais entre les mains musulmanes. Tout ce qui avait été établi par les Occidentaux est soumis, mis à part le contrôle de la ville de Tyr, maigre reliquat de la conquête occidentale. Les chevaliers croisés sont décapités à proximité des champs de bataille. Saladin décuple sa gloire : elle devient éternelle et traverse les siècles. De nos jours dans le monde arabe, Saladin est synonyme de résistance ce qui lui vaut d'être constamment cité en référence dans les conflits opposants les Occidentaux et le monde arabe, la Palestine, l'Afghanistan et l'Irak en tête.

Les ordres croisés

La formidable foi qui motive les premières croisades s'accompagne aussi de la création de plusieurs ordres religieux qui restent caractéristiques de ces expéditions : il s'agit des Teutons, des Templiers et des Hospitaliers, trois ordres fondés au début du XIIe siècle en Palestine sur une courte période de quinze ans, entre 1113 et 1128. Ces organisations montrent la nature spirituelle des premières expéditions. Les ordres se donnent tous une vocation de soutien des pèlerins et des croisés se rendant en Terre Sainte, par les soins qu'ils leur prodiguent. Une vocation souvent associée à une volonté guerrière, qu'elle soit née avec l'ordre ou qu'elle s'y ajoute plus tard, ce qui fait des membres des moines soldats. Ceux-ci font vœu de chasteté, pauvreté et obéissance auxquels est associé l'usage des armes pour garantir la sécurité des Occidentaux se rendant à Jérusalem.

Le rôle de ces ordres a été fondamental dans le déroulement des croisades. Non seulement ils assuraient une force constante qui garantissait une sécurité (plus ou moins relative selon les époques) mais l'extraordinaire richesse de certains d'entre eux permettait de financer une partie des fonds nécessaires au bon déroulement des croisades. C'est ainsi que les Hospitaliers, par exemple, construisent des forteresses près du littoral, en plein désert, ou reprennent des places fortes musulmanes comme le Krak des chevaliers (ci-dessus) en Syrie, obtenu en 1144 et qui sera particulièrement bien fortifié par les Hospitaliers à l'image de ce qui se fait en Occident. Le château est massif, c'est un fabuleux exemple de l'architecture militaire médiévale. Sans insister sur les aspects techniques (voir pour cela l'article sur l'architecture militaire), le château comprend un vaste espace pour stocker la nourriture en cas de siège et dispose, naturellement puisqu'il s'agit d'un ordre religieux, de chapelles et d'un cloître. Attaqué plusieurs fois par les armées musulmanes, dont celle de Saladin, il ne tombera qu'en 1271.

A côté du Krak des chevaliers, existent d'autres forteresses jalonnant la Terre Sainte comme celle du Moab ou de Montréal en Transjordanie ou encore le château de Margab sur la côte Syrienne. Ces édifices permettaient de préserver la domination latine dans la région et affirmait la puissance chrétienne.

La troisiéme croisade

La seconde croisade n'a pas permis de faire taire la menace musulmane et cet échec pousse de nouveau la papauté à lancer un nouvel appel, le troisième. De la même manière que lors des deux premières expéditions, la réaction est enthousiaste et engendre une coalition européenne regroupant trois des plus puissants monarques : Philippe-Auguste, roi de France, Frédéric Ier Barberousse, Empereur du saint-Empire Romain Germanique et Richard cœur de Lion, roi d'Angleterre. Trois noms, trois renommées pour une armée conséquente mais dont les résultats sont mitigés. Si Frédéric Barberousse meurt en Anatolie, provoquant le retour de son armée, les rois de France et d'Angleterre parviennent à reprendre à Saladin une partie des villes contrôlées en 1191. Mais avec le temps, la puissance de la troisième croisade s'affaiblit de nouveau par le départ de Philippe-Auguste, laissant Richard seul pour achever la conquête. Cette croisade s'achèvera par une trêve de trois ans signée avec Saladin, prévoyant la liberté d'accès à Jérusalem pour les pèlerins. Résultat mitigé puisque la ville Sainte n'est pas prise mais un nouveau royaume latin est reconstitué, moins puissant et moins étendu mais qui assure une présence chrétienne constante en terres d'Islam.

Les trois premières expéditions militaires restent dans l'ensemble des expéditions ayant abouti même si les résultats ne sont pas toujours ceux espérés. Elles sont toutes liées par un sentiment religieux sincère, un élan spirituel répondant à une volonté commune en laissant de côté et de manière générale les autres motivations. Mais si le XIIe siècle a été celui des croisades pieuses, la première moitié du XIIIe siècle voit un ralentissement nette de l'impulsion croisée par un détournement de l'objectif initial.